Qu’est-ce que l’apnée du sommeil?

Définition de l’apnée du sommeil
L’apnée du sommeil, appelé scientifiquement Syndrome d’Apnée du Sommeil (SAS), est une pathologie du sommeil malheureusement très répandue qui se caractérise par des arrêts involontaires et répétés de la respiration pendant le sommeil. Les causes de l’apnées du sommeil peuvent être multiples et ses conséquences très importantes sur la qualité de vie et la santé. Par définition, ces pauses respiratoires dites apnées durent au moins 10 secondes mais peuvent atteindre 30 secondes, voire dépasser 1 minute dans les cas les plus extrêmes. Ces apnées sont souvent accompagnées d’événements respiratoires appelées hypopnées, très similaires aux apnées, qui se caractérisent par une diminution importante du débit respiratoire plutôt qu’un arrêt total, accompagnée d’une réduction de l’oxygénation du sang d’au moins 3 à 4% entrainant un stress au niveau de tous les organes et du système cardio-vasculaire en particulier.
Prise indépendamment, chacune de ces pauses respiratoires peut sembler anodine, mais leur caractère répétitif tout au long de la nuit, nuit après nuit, peut avoir des conséquences sérieuses, pouvant mener dans certains cas à une issue fatale. En effet, par un mécanisme de défense naturel, elles vont réveiller le cerveau tout au long de la nuit afin de forcer une reprise ventilatoire, réduisant ainsi la qualité du sommeil. Ces brefs « microéveils » sont pour la plupart inconscients et passent donc inaperçus, mais leur impact est lui bien réel car ils fragmentent le sommeil, réduisent les périodes de sommeil paradoxal et provoquent, en résumé, un mauvais sommeil. Il existe bien sûr différents niveaux de sévérité de ce syndrome, et tout le monde peut faire quelques apnées sans conséquences notables. En plus de la recherche des symptômes caractéristiques de l’apnée du sommeil, un test diagnostic du sommeil appelé polysomnographie permet de calculer le nombre moyen d’apnées et d’hypopnées par heure de sommeil, appelé IAH pour Index d’Apnées Hypopnées :
- IAH < 5 : sujet normal
- 5 < IAH < 15 : syndrome léger
- 15 < IAH < 30 : syndrome modéré
- 30 < IAH : syndrome sévère
De façon analogue, ce test diagnostic permet de déterminer le nombre de microéveils et le sommeil est considéré comme significativement fragmenté au-delà de 10 microéveils par heure de sommeil. L’apnée du sommeil peut donc être un trouble respiratoire sérieux dont l’impact physiologique est double par la réduction répétée de l’oxygénation des organes et par la dégradation de la qualité de sommeil qu’elle induit. En fonction de la sévérité du syndrome, l’apnée du sommeil non traitée peut engendrer des risques sur la qualité de vie et sur la santé en général, avec des conséquences potentielles extrêmement sérieuses à court, moyen et long terme.
Quelles sont les causes de l’apnée du sommeil ?
Il existe principalement deux types d’apnée du sommeil, l’une de cause morphologique, appelé syndrome d’apnée obstructive du sommeil ou SAOS, l’autre de cause neurologique, appelé syndrome d’apnée centrale du sommeil ou SACS.
Le syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) est de loin le plus répandu et concerne environ 90% des cas de syndrome d’apnée du sommeil avérés. Pour faire simple, il s’agit d’un problème « mécanique » au niveau des « voies aériennes supérieures », le cerveau envoyant correctement les ordres aux muscles respiratoires, qui fonctionnent tout aussi correctement, mais le flux d’air est arrêté au niveau du pharynx et du larynx dont le diamètre est considérablement rétréci, voire totalement nul (on dit alors qu’ils sont fermés ou « collabés »), pendant l’événement obstructif.
La réduction normale de la tonicité musculaire pendant le sommeil joue un rôle important dans le mécanisme de survenue des apnées et hypopnées. Cette baisse de tonicité musculaire, notamment au niveau des muscles qui entourent et soutiennent les voies aériennes supérieures, permet l’affaissement des tissus mous tels que la langue et les tissus graisseux qui viennent donc mécaniquement écraser les voies aériennes supérieures jusqu’à stopper le flux d’air.
Certains facteurs peuvent amplifier ce phénomène :
Une surcharge pondérale du fait de la masse des tissus mous supérieure à la normale, les personnes présentant une obésité étant souvent les plus touchées
L’âge car la tonicité musculaire a tendance à diminuer en vieillissant, ce qui va entrainer une moindre résistance à la fermeture des voies aériennes supérieures
Une anomalie anatomique réduisant le diamètre des voies aériennes supérieures
La prise d’alcool dont l’un des effets est la diminution de la tonicité musculaire
- Anomalie des fibres nerveuses reliant le cerveau au muscles respiratoires
- Altération des centres nerveux tels que la moelle épinière ou le tronc cérébral suite un traumatisme, une infection ou une maladie neurodégénérative
Le mécanisme de l’apnée centrale est donc très différent de celui de l’apnée obstructive, mais les 2 formes peuvent coexister chez un même individu, on parle alors d’apnée du sommeil « mixte ».
Le traitement du syndrome d’apnée obstructive du sommeil (SAOS) et celui du syndrome d’apnée centrale du sommeil (SACS) sont aussi importants l’un que l’autre. Dans les deux cas il est important de consulter un spécialiste capable d’effectuer les tests diagnostiques adéquats et proposer le traitement adéquat pour mieux dormir.
Quels sont les symptômes de l’apnée du sommeil ?
Les symptômes les plus évocateurs du SAOS qui conduisent le plus souvent à la consultation, sont les ronflements bruyants accompagnés de pauses respiratoires qui inquiètent l’entourage, et/ou une somnolence diurne anormale et gênante chez le sujet. Mais l’apnée du sommeil peut entrainer d’autres symptômes tout aussi problématiques.
Les symptômes les plus courants peuvent être catégorisés de la façon suivante :
- Les symptômes se manifestant pendant le sommeil, le plus souvent repérés par le conjoint ou l’entourage qui s’en inquiètent
- Ronflement important, voire insupportable pour l’entourage
- Des pauses respiratoires fréquentes souvent accompagnées de reprises respiratoires impressionnantes
- Une agitation avec changement fréquents de position corporelle
- Des réveils nocturnes en sursaut avec la sensation de suffoquer
- Bruxisme (grincement des dents)
- Les symptômes se manifestant durant la nuit et la journée au sujet lui-même
- Sueurs nocturnes
- Levers fréquents dans la nuit pour uriner
- Maux de tête fréquents au réveil
- Impression de sommeil de mauvaise qualité
- Fatigue chronique
- Manque de vigilance
- Somnolence diurne anormale, endormissements dans des situations gênantes (en réunion…) voire dangereuses (au volant…)
- Troubles cognitifs
- Difficulté de concentration
- Temps de réaction allongé
- Mémoire altérée
- Baisse de la libido voire dysfonction sexuelle
- Irritabilité
- Dépression
Le fait de ronfler et les autres symptômes, pris indépendamment, ne sont pas forcément spécifiques à l’apnée du sommeil, mais leur présence entraine une forte suspicion nécessitant la pose d’un diagnostic par un médecin spécialiste.
Quelles sont les conséquences de l’apnée du sommeil ?
La conséquence de chaque apnée obstructive peut être immédiate du fait d’une cascade d’événements physiologiques ayant pour but de lutter contre cet arrêt respiratoire. En résumé, l’arrêt du flux d’air entraine une baisse du taux d’oxygène (O2) dans le sang, appelée désaturation, doublée d’une augmentation du taux de gaz carbonique (CO2), entrainant l’envoi d’un signal d’alerte au cerveau par l’intermédiaire de capteurs biologiques spécifiques.
Le cerveau ainsi alerté va, d’une certaine façon, « s’éveiller », c’est à dire entrer dans une phase de sommeil plus léger voire atteindre un état de quasi-veille pendant un court laps de temps, afin d’envoyer aux muscles respiratoires l’ordre d’amplifier les mouvements respiratoires jusqu’à rouvrir les voies aériennes supérieurs de force, souvent de façon extrêmement sonore : la personne atteinte reprend son souffle de manière souvent impressionnante comme si, certains proches le décrivent ainsi, elle venait d’échapper à une noyade.
Il faut bien comprendre que ces petites phases de réveil, appelées micro-éveils, sont extrêmement perturbantes pour la qualité du sommeil car elles diminuent voire suppriment les phases de sommeil profond, dit réparateur, dans les cas les plus graves. Le manque de sommeil véritable peut alors engendrer ce que l’on appelle une somnolence diurne ou hypersomnie, caractérisée par une fatigue excessive voire des endormissements inopinés pendant la journée, même au travail, voire extrêmement dangereux en cas de somnolence au volant.
A moyen et long-terme, le manque de sommeil réparateur ajouté aux diminutions d’oxygénation des organes répétés, peuvent conduire à des problématiques supplémentaires.
Les risques et conséquences de l’apnée du sommeil peuvent être synthétisés ainsi :
- Somnolence diurne (hypersomnie) et risques d’accidents
- Impact professionnel de la fatigue chronique voire de l’endormissement inopiné sur le lieu de travail, pouvant entrainer un accident du travail
- Risques d’accidents de voiture, souvent mortels, les études ayant montré jusqu’à 7 fois plus de risques pour une personne apnéique non traitée
- Troubles cognitifs
- Difficultés de concentration
- Temps de réaction allongés
- Troubles de la mémoire
- Troubles du comportement
- Baisse de la libido voire dysfonction sexuelle, ajoutée au ronflement souvent important poussant de nombreux couples à faire chambre à part, pouvant entrainer un éloignement de son/sa partenaire
- Réduction de l’activité physique et désengagement d’activité sociales pouvant entrainer un éloignement de son entourage
- Dépression
- Comorbidités
- Diabète de type 2
- Maladies cardio-vasculaires chroniques tels que l’hypertension artérielle et l’insuffisance cardiaque
- Accident vasculaire cérébral (AVC)
Le syndrome d’apnée du sommeil est donc associé à des conséquences qui peuvent être très sérieuses, dont la liste ne cesse de s’étoffer à mesure des avancées de la recherche clinique.
Quelles sont les personnes à risques pour l’apnée du sommeil ?
Les facteurs de risques les plus courants de l’apnée du sommeil sont les suivants :
- Personnes en surpoids ou obésité. Il s’agit du facteur de risque le plus significatif, le risque étant multiplié par 7 en cas d’obésité. L’excès de masse graisseuse au niveau du cou agit mécaniquement en pesant sur les voies aériennes supérieures jusqu’à les fermer partiellement (hypopnée) ou totalement (apnée obstructive).
- Circonférence du cou. Le risque d’apnée du sommeil est proportionnel à la circonférence du cou au-delà de 43cm chez l’homme et 40cm chez la femme.
- Âge. Le syndrome d’apnée du sommeil est 2 à 3 fois plus fréquent au-delà de 65 ans.
- Sexe. Les hommes ont un risque 2 à 3 fois supérieur à celui des femmes.
- Anomalies anatomiques ou congestion. Certaines personnes présentent des voies respiratoires trop étroites et/ou des tissus mous au fond de la gorge (amygdales, voile du palais, luette…) trop volumineux qui réduisent le passage de l’air. Une congestion répétée au niveau du nez (en cas d’allergie par exemple) ou une anomalie anatomique au niveau des mâchoires peuvent aussi faciliter le SAS.
- Tabagisme et alcool. Il s’agit de facteurs aggravants, le premier entrainant probablement une irritation des voies respiratoires et le deuxième entrainant une diminution du tonus musculaires favorisant la survenue et la sévérité des apnées.
- Médicaments. La prise de certains médicaments entraine aussi une diminution de la tonicité musculaire favorisant ainsi l’apnée du sommeil. Les plus connus sont les anxiolytiques, les somnifères et les relaxants musculaires.
Il faut aussi noter que l’apnée du sommeil est fréquemment associée à d’autres pathologies chroniques, notamment des maladies métaboliques et cardiovasculaires, souvent dans des proportions très importantes. En langage médical, on parle alors de « comorbidités » :
- Diabète de type 2
- Hypertension artérielle
- Maladie coronarienne
- Accident vasculaire cérébral (AVC)
- Insuffisance cardiaque
Le nombre de personnes affectées par l’apnée du sommeil sévère est de ce fait très important. Les études épidémiologiques historiques estiment la prévalence du SAOS à 2% pour les femmes et 4% pour les hommes de 30 à 60 ans. Des études plus récentes laissent penser que cette prévalence est sous-estimée et qu’elle pourrait être de l’ordre de 7 à 10% de la population générale. Il y aurait donc en France des millions de personnes potentiellement concernées, dont la vaste majorité l’ignore encore.